Bienvenue sur Alexagère

Opinions tranchées, points de vue partiaux, caricatures iconoclastes, analyses simplistes, expressions à l'emporte-pièce, conclusions hâtives...
Des avis sur tout mais surtout des avis. Taquin mais pas moqueur, écorché mais pas donneur de leçon, provocateur... De rires je l'espère.
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mercredi 15 avril 2015

Alexpiration

Parfois on va chercher très loin des choses qui résident sous nos yeux, des évidences si présentes qu'on ne les calcule plus. Dans ma quête cervantesque pour raser les crevards de tout poil, j'ai parcouru le monde, exploré, défriché, démasqué, souffert, pris sur moi, essuyé. J'ai subi les taxis parisiens, les journalistes et les consultants. J'ai pointé du doigt des idiots exotiques en mal de castings et des sportifs manchots, alors que la pire espèce qui peuple ce monde est juste là, tout contre moi, posée sur mon cœur. Elle est tapie dans ma poche, nous passons nos journées ensemble. Elle a tellement peur que je l'oublie qu'elle a laissé sa carte dans mon portefeuille. Bleue, dorée ou noire, cette carte a toujours la couleur de la vaseline, c'est celle de ma banque. On dit que le plus vieux métier du monde est la prostitution, c'est faux : pour exister elle avait besoin d'argent. La banque est le premier maquereau de l'histoire.

Mais la comparaison ne s'arrête pas là, même si je réfute l'idée de mettre les banques au même niveau que les putes, car avec les putes, au moins, on s'amuse en se faisant vider les bourses. Et puis on paie avant, pas après. Cependant voilà le paradoxe, dès que la banque entre en jeu, rien ne va plus, c'est une sorte de partouze financière qui se met en branle, avec votre commercial conseiller dans le rôle de DSK et vous dans le rôle de Jade, le cul à découvert et le fun en débit différé. 

Evidemment, rien de tout cela ne paraît en surface. Dans la banque, on est sérieux, on affiche cette posture de notable de province pour masquer la culotte sale cachée dans le coffre. C'est qu'il faut avoir l'air respectable pour parler d'argent. En général, ça commence de manière très feutrée, avec une cravate. Pour peu que vous possédiez trois francs six sous, vous verrez s'illuminer l’œil opaque de votre commercial conseiller, excitation qui se manifestera par une prise en main de son organe sensible, la calculatrice. Il la caressera jusqu'à ce qu'elle crache une flaque de taux sur un contrat. Contrat qui, bien roulé, prend la forme d'un dildo dont le nom local est assurance-vie. Moi j'appelle ça des placements Spéculoos : c'est enrobé d'un super packaging et à la fin on ne récupère que des miettes. A force d'écouter ses mots abscons qui ressemblent à ceux des médecins que Molière décri(v)ait, j'ai toujours trouvé drôle qu'il m'appelle Monsieur alors que je ne suis pour lui qu'un taux d'intérêt qui parle. Tais-toi donc, Alex, range ton revolving, ça va encore te coûter des frais de gosier. Après tout il ne s'agit que d'acheter de l'argent.

Mais ça, c'était avant. Maintenant que l'escompte m'est compté, je vois en face de moi... Personne, et à la place j'entends des serveurs vocaux me chanter un vibrant hommage à Zebda et à leur célèbre formule : "je crois que ça va pas être possible". Le comble pour une banque, c'est de vous laisser pour compte. Alors il m'arrive de rêver d'évasion avec ma conseillère, je l'imagine sur sa chaise baissée. Peut-être que finalement je trimballe le fantasme inavouable de me faire une pute sur un lac près de la frontière suisse ? Mais qui d'autre qu'elle peut m'amener sur les rives du bel agio ? Et puis pour elle, ce serait facile, elle a tellement de congés qu'elle va plus vite en posant des semaines de travail.

Quand ce qui devrait être le poumon de l'économie se contente de recycler sciemment les liquidités en circuit fermé, cela s'appelle un PIB-ocide. La FED, la BCE et la Banque de France (intermittente du spectacle inter-bancaire), telles Flora, Pâquerette et Pimprenelle, gesticulent pour tenir éloignés les taons à taux qui vampirisent sang pour sang (merci Johnny) des flux au lieu de polliniser. Quelle chance que d'être un parasite sans prédateur.

Trêve de jérémiades ! Je n'ai pas besoin de rêver d'une banque, j'ai déjà trouvé la banque idéale, celle qui me proposera de financer ma pierre tombale avec un taux d'enfer et sur laquelle sera inscrit : "ici repose Alexagère, expiré le 15/04/20??, date de valeur 1er octobre".

dimanche 12 avril 2015

Odette

Aujourd'hui je bouscule l'agenda, car, pour la deuxième fois en peu de temps, un événement survient qui me bouleverse. La première fois, c'était le 7 janvier, déjà à cause d'un prénom.

Hier, je mettais la touche finale à ma prochaine exagération, et puis, à la bourre comme toujours, nous dûmes partir à un anniversaire dans le quartier. Petit comité, vins et fromages, chat mignon et enfants sages, everything in its right place. Elle était là, au milieu de ce banc amical, toute souriante. Avec une gouaille lumineuse et un humour dévastateur, elle posait des questions franches et directes tout en faisant quelques allusions à son vécu. Du haut de son mètre soixante et de ses bientôt quatre-vingt printemps, Odette dénote dans le climat habituel de ce genre de fête. Moi, j'adore. En plus elle m'a dit franco que j'étais beau mec, alors vous pensez, j'ai fait le plein d'ego pour les 40 ans qui viennent.

Odette peint. Au fil des verres et de la conversation, elle nous invite à visiter sa maison, dans l'arrière-cour de l'immeuble. Le petit groupe descend l'escalier et nous nous retrouvons dans son jardin. A chaque pas, on réalise que l'on entre dans un lieu particulier, un endroit chaleureux, un cocon. Les toiles enchevêtrées dans son atelier rayonnent de joie, de couleurs, de textures. Des styles, des tailles, des thèmes différents, avec pour fils conducteurs la beauté et la vie. Sa dernière toile, faite à la fourchette, me reste dans la rétine. C'est une ode au bonheur. Au détour d'une question de sa voisine, Odette revient sur ses débuts de peintre, et sur les étapes précédentes. La première de ces étapes, c'était l'orphelinat où elle s'est retrouvée à 4 ans parce que ses parents ont servi de combustible à un fabricant de fours allemand établi en Pologne. Elle me tend le livre qu'elle a écrit, me demande de bien lui rendre, c'est le dernier qui lui reste. Je n'en dirai pas plus, d'abord par pudeur, ensuite pour éviter de la jeter en pâture au marchand d'ananas qui se fera une joie de gueuler partout que les juifs revendiquent le monopole du génocide. 

Merci Odette, pour votre gaieté, votre appétit de vie, merci de m'avoir rappelé, juste en étant vous-même, que mes petits bobos de bobo cadre quadra ne sont que des verrues de l'âme, merci d'avoir ouvert votre cœur dans ce monde où il est de bon ton de jouer au gros dur. Sur le chemin du retour j'ai pleuré, en étant heureux de vous savoir tout près de chez moi et en me promettant de vous écrire ces quelques mots.

mercredi 1 avril 2015

A poil

A toi qui m'as précédé aujourd'hui dans la douche des vestiaires, je voudrais rendre ce vibrant hommage. Je tiens à préciser en introduction que j'ai fait l'armée, et que je ne suis pas bégueule, ni maniaque, enfin, pas plus que Desproges. Mais voilà qu'un certain atavisme médical et un goût prononcé pour l'hygiène ont repris le dessus et me poussent à répondre avec ma plume à ton abandon de pelage.

Tout avait bien commencé. Nous rentrions de notre petit trot méridien, les uns et les autres papotaient en grappes sur le banc. Comme il y avait du monde, chacun attendait son tour pour l'atelier lavage. Le mien arriva enfin et je me dirigeai vers le jet tant attendu, tout nu dans ma serviette, qui me servait de pagne, j'avais le rouge au front et le savon à la main, quand vint une vision, mais pas dans l'eau de Seltz...

D'abord, j'ai cru à une blague. Après tout, on est le 1er avril et il y a une bonne bande de potaches dans ces quelques mètres carrés. En découvrant la forêt de poils qui jonchait le receveur, j'ai pensé que tu avais couru avec ton ours. Pourquoi pas, c'est un excellent moyen de faire des fractionnés s'il n'a pas mangé depuis trois jours. Mais non, l'ours est dans sa cage et les chattes sont de l'autre côté du mur (oui, je suis un potache comme les autres). Les hypothèses fusèrent. Peut-être t'es tu roulé dans quelque substance irritante, peut-être as-tu confondu le tube de Veet de ton épouse avec ton flacon de Mennen-qui-pue ? Peut-être as-tu mué, tel le bison au printemps ? Ton slip t'a-t-il tant irrité que ce fût l'hécatombe dans le bush tout le long de ton SIF(*) ? Bah, à quoi bon réfléchir ?

Moi qui ne supporte pas de voir l'un de mes poils se promener en liberté, imagines-tu mon désarroi lorsque je pénétrai la cabine ? La vision de ce tapis de moumoute fraîchement tombée me fit vaciller. Que faire ? Filmer, pour prouver que la réalité dépasse Alexagère ? Las ! Mon smartphone n'étant étanche qu'aux appels chiants, il dormait tranquillement dans mon bureau. Poser le pied dessus ? Le poil mouillé est un lubrifiant bien connu, et à peine rentré de ma course, je n'avais pas envie de me casser la golèche. Et puis moi, les champignons, c'est dans les omelettes que je les aime. Ressortir et t'appeler eût été tentant, mais tu serais capable de dire que ce sont les miens ou ceux d'un autre, et il n'y aurait plus qu'à faire un constat ou appeler les Experts-Neuilly-sur-Seine pour une comparaison scientifique du nombre de vrilles. Je finis par prendre mon courage et le pommeau de douche à deux mains, et fis ce petit geste simple que tu avais malencontreusement zappé. Un siphon, font, font, trois petits poils de quéquette, et je bénis cette bonde qui avala sans sourciller le tourbillon de vilains vermicelles.

Une chose est sûre : au Salon du Poil, tu as le plus beau stand et ton oubli est entré au Panthéon des velus sales de bain. Et dire que nous sommes collègues ! Et dire que notre grand Cabinet vend de l'excellence ! Heureusement qu'il ne vend pas du carrelage. C'est donc en toute logique que j'invoquerai Malraux pour te donner mon conseil : va chez Leclerc et achète de l'acide, avec son cortège d'émanations dans le sous-sol qui pique, entre ici gros malin, avec ton terrible cortège...

(*) SIF : Sillon Inter-Fessier