Bienvenue sur Alexagère

Opinions tranchées, points de vue partiaux, caricatures iconoclastes, analyses simplistes, expressions à l'emporte-pièce, conclusions hâtives...
Des avis sur tout mais surtout des avis. Taquin mais pas moqueur, écorché mais pas donneur de leçon, provocateur... De rires je l'espère.
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jeudi 31 décembre 2015

Rideau !

L’année se termine, les imbéciles disent « enfin !», comme si la stupide ponctuation que sont ces festivités forcées allait interrompre ou inverser le cours des choses. La St. Sylvestre n’est qu’une grande chasse d’eau que l’on tire sur une diarrhée de niaiseries en tapotant frénétiquement des sms. Faire sauter les datacenters Orange, SFR et Bouygues ce soir, ce serait une bombe lopéramide. Mais bon, je dis rien, je veux pas tomber pour incitation à la constipation en lien avec une entreprise télécom.

Boboland est en deuil. Les morts sont tous des braves types, dit Brassens, repris à l’envi par Le Monde. C’est pas marrant cette galerie de portraits dont on aurait pu être. A bien y regarder, ne l’ont-ils pas un peu cherché tous ces pauvres gens ? C’est vrai, aller voir dans un endroit ciblé, un groupe dont le leader est un catholique intégriste notoire, membre de la NRA et fan de W. Bush… C'est à la limite de la provocation barbeuse. Sont cons ces français, ils ne lisent toujours pas les sous-titres. Et ça, les petites racailles, qui sont aussi armées que merdeuses, elles le savent. On peut mourir de tout, mais pas avec n’importe qui. Surtout quand ça nous permet de vendre des armes. Alors pas touche Nemmouche ! Thalès et Safran te disent merci, Mehdi !

Le monde a de la fièvre. Tu es bien seule, Mafalda. L’autre jour un type a dit dans le journal que la hausse des températures c’est à cause des vents solaires. Il n'a qu’à montrer son cul au soleil, on verra s’il fait des vents. A ce jour, la seule pollution que la COP21 a stoppée, c’est celle du périphérique parisien. Les alter-mondia-couilles qui s’excitent devant les caméras avec leurs guitares, leurs stands à merguez et leurs incantations, ça joue aux durs avec les CRS mais ça ne va pas sur le terrain pour tuer les braconniers. Y’a peut-être un truc à faire, là : reprogrammer les daeschiens pour qu’ils aillent se faire sauter devant chaque type qui veut shooter un éléphant. Comme ils sont stupides, il suffit de les exciter avec un petit missile en forme de rôti de porc et leur dire d’aller exploser devant la défense. Mais avant de les y voir, il faut trouver le traitement hypothermique.

En attendant que les suppos de Safran fassent effet (de serre, bien entendu), le temps fait des ratures, les vacanciers pleurnichent parce que le ski sur herbe, ils ne maîtrisent pas. Cela dit, le ski tout court, non plus. Avec leurs tenues de perroquets, leurs masques de mouches et leur totale incompétence à piloter des planches pourtant conçues pour être plus maniables que jamais, ce sont des dangers publics quand ils s’élancent du haut des pistes au mépris du reste du monde. Un peu de glisse les grise, et tant pis s’ils prennent le risque de scier un gamin en deux avec leurs carres. Le skieur inconscient et le surfeur branleur sont des versions civiles et acceptées de kamikazes, parce qu'ils sont nés du même bouillon de médiocrité en forme d'hexagone, savamment touillé par la Folie Douce. Pour ceux qui ne connaissent pas encore la Folie Douce, c'est une boîte. Enfin, disons qu'elle est au ski ce que la boîte de Petri est à la microbiologie. Une boîte de pète ski, quoi.

Les morts et la chaleur, si les uns découlaient de l'autre ça sonnerait "canicule". En 2015, année dégoulinante, l'un coule sur l'autre, coulis rouge sur glace fondue. On est touché, mais pas couché. Moi je m’en fous, je suis heureux en coulpe. Je préfère les seins de Katy Perry aux intempéries. Mon stress, c’est de savoir si je vais pouvoir continuer à avoir ma Benz l’année prochaine, avec ou sans Joey Starr. Histoire de faire déguerpir tous ces nases en Scenic qui squattent la file de gauche sur la route des vacances parce que ça leur donne l’impression qu’ils sont les chefs la route. Le roi de la route, c’est moi, ok ? Ma Benz, mon shot à ego, mon avion de chasse-plouc, mon agrandisseur de pénis, mon aspirateur à gonzesses, c’est ma signature. L’avantage du terroriste, c’est que lui au moins, il roule vite. Faut juste qu’il pense à ne pas boucler sa ceinture.

Rideau !

samedi 21 novembre 2015

Histoire belge

C’est l’histoire d’un bout de colonne vertébrale qui tombe tout cru sur le capot d'une voiture de police. Et bang ! Merde, une Peugeot toute neuve ! Mercredi, les hommes du RAID sont tombés sur un nid de guêpes. A leur insu, ils ont appris en live la recette du terroriste-melba. Hasna avait pourtant prévenu : si ça continue j'vais m'découper, suivant les pointillés.

Le nid de frelons lui, on le connaît depuis un moment, il est à Bruxelles. Fini le temps où Bruxelles chantait, nous sommes au temps du silence assourdissant à Molenbeek, il résonne jusqu'ici. Dans un coin, ils passent du Trenet, boum, et votre cœur fait boum... Attention Abdelhamid, le djihad rend con, tu vas arrêter de te trémousser comme si tu avais un bâton de dynamite dans le cul ! Ah, pardon. Allez hop, prends ton Thalys et fiche-moi le camp d'entraînement !

Les journalistes, eux, sont contents. Plaies mobiles, en avant les histoires. Play blessure, j’me chope des suées à St. Denis, même le ballon ne tourne plus rond. La faute aux fiches S, S fichent du monde… Je me demande bien où est la vérité. Forcément, quand mon pays a tellement léché la raie des saoudiens, ses plus gros clients pour l'industrie d'armement et plus gros bailleurs de fonds de Daech, elle devient comme un mirage : difficile à percevoir. Si j'avais pu rire de cette catastrophe, j'aurais quatari. De juillet à novembre, marbre à Cannes, l'arbre à came cache la forêt de caméras. Non mais t'as vu c'qui passe ? J'veux l'feuilleton à la place.




Ah, l’Allah, il est vraiment temps que tu changes de représentants de commerce. Ou alors on devrait les envoyer se faire deux ou trois putes, ça les déniaiserait. Poutine y a réfléchi, il vient de comprendre à l’insu de son plein gré que les putes russes, c’est des bombes. Imagine qu’on largue en parachute des régiments de Tatiana, Olga, Svetlana, dans le ciel de Syrie… Là mon ami, je comprendrais que ça te donne envie de sauter, mais je ne te garantis pas qu’elle soient toutes vierges. Et puis d'abord, t'as qu'à remplacer le Captagon par du Viagra. Attends voir, ah oui mais non, c'que je suis bête, ça peut pas marcher : pour faire ça il faut avoir des couilles.

Pas de couilles et espérer se retrouver avec soixante-douze pucelles, faut vraiment être débile mental ! Je vais te dire un truc, faut pas croire tout ce qu’on te raconte, le vendredi ! Tiens par exemple, Sham signifie ‘imposture’ en anglais. Ça me fait mal de l’admettre, mais pour une fois les anglais ont raison. Quant à Bachar, ça veut dire 'boucher' en arabe. Non, pas le petit commerçant halal de ton quartier. Je t'explique : c'est un boucher industriel, le Spanghero du peuple, spécialisé en chair à rien. Il paraît que c'est bon pour son régime. Son business model, c'est le volume. Le prix au kilo de 100.000 morts syriens depuis 4 ans (comme celui des 2.000 hommes, femmes et enfants tués par Boko-Haram au Nigeria le week-end de Charlie) vaudra toujours moins que celui de 130 bobos clopards. C’est comme çaaaaaaa, la la la la la... Je les pleure, le prix au litre de mes larmes augmente et le stock diminue.

Alors, même s'il ne fait pas bon être résident de la République en ce moment, on ne va pas s'arrêter de faire la fête, de boire des coups quand tu les tires et d'aller à des concerts puisque tu es sourd, toi qui as compris "allégeance" quand on te disait "intelligence". Il y a peut-être une exception, un groupe où on regrette que tu n'aies pas l'ouïe fine. Si Téléphone, pardon, les Insus, avaient fait leur retour deux mois plus tard, on aurait joint l'utile à l'agréable : à une enjambée du Carillon, la bombe humaine nous aurait débarrassés de ces vieux croûtons qui tirent une larme aux nostalgiques d’une époque où l’on croyait dur comme fer que la finance allait nous sauver. Ça, c’est vraiment pas moi.

Aux armes, et caetera. Dans mon texte il y a trois insus de secours, comme au Bataclan. Elles resteront toujours ouvertes, une fois.

dimanche 30 août 2015

Des laits, des laits

A l'heure où des millions de migrants - nouveau mot journalistique pour décrire des réfugiés, eux-mêmes euphémismes pour parler de miséreux chétifs qui préfèrent boire la tasse et lécher nos poubelles que mourir dans un camion, et que quand on les sauve, on n'a pas la Légion d'Honneur - arrivent sur nos écrans pendant qu'on est à table, j'avais envie de vous parler de bouffe. Mais pas n'importe laquelle. La bouffe cool, citadine, qui nous parle comme à des cons potes. Celle que rien qu'en la regardant, on est de bonne humeur. Enfin, c'est ce qu'ils essaient de nous vendre, de la bonne humeur en bouteille.

Ils, c'est Michel, Augustin, Jérôme, Ferdinand et les autres. Avec leurs bouclettes, leurs barbichettes, leurs bérets et leur air Innocent, on leur donnerait notre estomac sans confession. Parce qu'ils sont à l'image de leurs cookies et de leurs smoufis, ils sont djeunes, ils sont beaux, ils sont biens, ils sont bios, on dirait les Minions de la bouffe, versions modernes du berger Capitoul. Et surtout, ils nous aiment. Si c'est vrai ! C'est marqué sur l'emballage. Pour mieux nous emballer, ils mettent que des bons produits qui font guili-guili dedans, des bonbons pour bobos à base d'oignons nouveaux, des bonobos. On se sentirait presque coupable d'avoir pulvérisé cette petite orange de façon si mécanique (enfin moi j'ai une excuse, je m'appelle Alex). Et cette banane !... Mère de tous les régimes, il ne lui manque qu'un prénom. Marie-Jeanne, ça irait ?

Ils nous cajolent, en faisant des blagues sur l'étiquette, ce qu'on appelle des blagounettes. Ce qu'elles sont drôles ! Aaah... Ce ton léger, ce faux cool parisien qui dégouline et se répand dans tous les linéaires. Il est très important pour eux de nous parler comme à des débiles. Limite ils nous tutoient en nous tapant sur l'épaule, c'est leur définition du cool. Prêts à toutes les bassesses marketing, ils ramènent leur fraise et ils passent à l'orange. Ils roucoulent pour que le cool coule. Ils nous proposent même de passer les voir. Ben tiens, je vais vous prendre au mot les mecs. Mais je ne viendrai pas seul. Il y aura Pete, Georgie, Dim et moi, des droogies pour des smoothies et on vous obligera à nous faire du Moloko+.

En bons businessmen, ils n'ont pas oublié de faire l'ESCP avant de mettre les gâteaux dans le four. Les ingrédients sont à gauche, la recette est à droite. Quatre hamburgés (en français dans le menu) accompagnés de quelques frites pailletées avenue Charles de Gaulle, 57€... Ferdinand m'a rempli l'estomac et siphonné le porte-monnaie. Il y a quelques mois j'ai croisé Augustin, oui, celui-là, au SIAL. Malgré son visage angélique, il m'a parlé sur un ton pas du tout bio. C'était même plutôt du fast-dégage. Bon , d'accord, j'étais venu parler de risque de fraude, mais quand même ! Bref, la texture de leurs slogans donne à leur purée un goût de vaseline.




Alors écoutez-moi un peu, pauvres nez-de-bœufs, toi le Jérôme, avec ta French bouffe, et toi, le Ferdinand... Me touche pas mon pote, sinon je te fricasse la tête jusqu'à la commotion céréale, service compris. Compris ?

jeudi 30 juillet 2015

Privé de voyage

Autant le dire tout de suite, le tourisme, c'est de la merde. Je sais, c'est une immense porte ouverte, mais elle grince dans ma tête depuis si longtemps qu'il me fallait la défoncer à tout prix. Et le prix justement, c'est la clé. Les sirènes des sites bidule-privé-point-com (cette manie d'être privé de tout !), qui attirent le chaland en vendant des voyages de riches à des tarifs de pauvres, ont pris le pouvoir. Ils ont cassé les prix, les autres ont tout compris grâce à cette formule digne d'Harry Potter, all inclusive. On voit le résultat sur les moldus.

Au terme d'un voyage nocturne et compressé dans ces bétaillères que sont les avions charters, les hordes aussi bruyantes qu'hébétées débarquent dans les lieux hauts de gamme qui, pour assurer la rentabilité, font des compromis sur la clientèle comme on ouvre les valves d'ajustement de pression dans un barrage. Pour tenir sa promesse dès l'aube, le palace doit se travestir en club Marmara. Le peuple migrateur inonde la place et soudain le lobby se remplit d'une ambiance de camping à laquelle il n'était pas habitué. C'est la vague du popu-l'eau qui sent le pastis.

On les reconnaît à plusieurs signes distinctifs, au premier rang desquels figurent, non, plus les claquettes Arena, mais les marques qu'ils arborent fièrement dès le premier petit déjeuner. Là encore, ça sent les sites promotionnels à plein nez, qu'ils ont dévalisés pendant les soldes dans l'unique but de se pavaner autour de la piscine tels des papagayos. Où que le regard se porte, à 360 degrés, vous n'échapperez pas aux accoutrements Superdry et Hollister, couleurs criardes et coupes approximatives, mais bon, faut comprendre, le Rana Plaza n'est pas fini de reconstruire. Cette année, les t-shirts Abercrombie&Fitch rasent les murs... Et l'on reconnaît les gens du Val d'Oise au marcel Jack&Jones qu'ils ont acheté au Marques Avenue de Franconville...

Ça contraste avec l'air désabusé et hautain des habitués du lieu. Ne vous laissez pas impressionner. Ce sont des Patrick Chirac en puissance, justement, avec plus de fric. Le test ultime, c'est la bouffe. Mettez n'importe lequel de ces individus face à un buffet, vous verrez qui il/elle est vraiment. Dans cette configuration, riche ou pauvre, on est tous le même animal, homo beaufus. Et les seuls qui grugent dans la queue, c'est qui, hein, hein ? Ben oui, c'est les français, vindicatifs et gueulards avec leur esprit "j'ai payé, j'y ai droit" que le front populaire a bien vissé dans leur adn. Même les italiens sont médusés.

J+1, après quelques étalages oléo-crémo-gélo-puants, les ados exhibent leur narcissisme boutonneux dans des maillots mini- ou maximalistes, mais toujours disproportionnés, pendant que leurs mères, quadras mures ou jeunes quinquas, se toisent dans un défilé de couleurs claires de femmes, dévoilant leurs vergetures, ou pas, selon qu'elles se prennent pour des égéries de chez Mixa Mémé.

J+2, on prendra soin de réserver son transat avant le petit déjeuner en posant quelque effet personnel dessus. Le summum du glauque.

J+X, on entamera les visites et autres circuits pour gogos. En bateau, en car ou en voiture, par leur unique présence, ils abîment tous les paysages. Le troupeau ne se perd jamais de vue et déferle dans les magasins qui les attendent à camelote ouverte.

Allez, courage, ça va durer 15 jours, vous êtes prévenus. Enfin... On est tout de même mieux dans cet hôtel penta-stellaire qu'à devoir se battre pour son mètre carré de sable pisseux à Palavas-les-Flots.

Le business du tourisme, c'est une arme de beaufisation massive. Finalement, cette fusion des genres entre un tourisme pour riches flattant l'ego d'une poignée de crétins méprisants qui croient que tout le monde a les moyens d'être insouciant, et l'illusion vendue au plus grand nombre, n'est pas illogique. Les uns paient pour de l'isolement, les autres immolent leurs économies pour entretenir leur cohue matricielle tout en lorgnant sur les goûts des premiers. A force de placarder toujours les mêmes photos sur les murs du RER depuis quarante ans, le tourisme est devenu un soft djihad, car s'empiffrer après l'abreuvoir pré-dînatoire est une religion. En route pour cette croisade moderne, façon de continuer à se bousculer, mais de son plein gré. Tout ça pour du sable.

Jean-Marc, tu nous manques.
Copyright Reiser, On vit une époque formidable, 1976


Bon, il faut que je vous laisse, il est 19 heures, le restaurant ouvre, j'y vais maintenant sinon il va y avoir du monde comme à midi une à la cantine.

mercredi 1 juillet 2015

Je retiens un (plaidoyer pour un manager)

C'est la saison des évaluations de fin d'année. J'aime bien cette période, tout le monde est dans l'expectative et cache plus ou moins habilement sa fébrilité en attendant le fin mot, qui en général est un chiffre, et pour certains le mot de la fin. De manière quasi-inexorable, l'issue du process creuse le fossé entre le manager et ses équipes (j'adore les gens qui disent "mes équipes", ça fait tellement plus important que "mon équipe", on croirait qu'ils dirigent des légions romaines) tant ces dernières vivent comme une injustice absolue de ne pas être à l'école des fans. Sauf évidemment quand le premier s'entoure de sbires, comme c'est le cas du mien. Il a sbires, il est clanique, Sbire 2000, Sbire 2000... Dans le monde du travail tout est affaire de bandes, comme dans les cours de récré et les tombeaux égyptiens, j'y reviendrai, en attendant Bring me the network king.

S'agissant de réseaux, on trouve le reflet de cette mièvrerie salariale sur les pages de Linkedin qui dégoulinent d'incantations plus ou moins pleurnichardes envers cette créature chimérique appelée "Leader". Moi, le dernier leader que j'ai vu à la télé, il s'appelait Maximo et il ne m'a pas donné envie de fumer des havanes. Mais à Manageland, le boss est un vilain, le leader est un gentil. Ce qui pose implicitement le postulat que tous les managés sont des gentils. Qu'un nombre incalculable de managers, pardon, de chefs d'équipes, soient des névrosés professionnels voire des pyschopathes avérés qui déversent des hectolitres de stress sur leurs subordonnés, ce n'est pas tout à fait faux. Dire qu'ils le sont tous, c'est encore moins vrai. Promenons-nous un peu dans les couloirs...

Il est de bon ton, aujourd'hui, de décrire le mideul manadjeur comme le contremaître du XXIème siècle. Quelque part entre Koh-Lanta et Caméra Café, il est en version industrielle, ce que le peloton est au Tour de France, ce que le sous-officier est à l'armée : un élément clé du dispositif qui accepte ce rôle ingrat de ciment des troupes, tout en sachant qu'il n’accédera jamais au poste de commandement malgré le D qui entretient cette illusion dans le grade sur sa carte de visite (DAF, DSI, DRH, voire même Dégé). A ce titre il ne faut pas confondre celui qui a commencé tout en bas de l'échelle et qui est arrivé tout en haut, avec celui qui arrive au milieu et qui restera collé dans ce ventre mou toute sa vie extra-utérine. Le manager est un médiateur inlassable entre actionnaires et salariés, ces peuples voués à s'entendre comme un poisson avec une bicyclette. Comme son homologue alcoolique, l'adjudant de bureau vit au contact permanent des hommes et femmes du rang, qu'il est chargé de maintenir dedans. Et cela, ça sert d'os comme dirait le chien du curé. En effet, encadrer une équipe relève du sacrifice le plus pur, de l'abnégation totale, du don de soi absolu. Le frêle "é" d'"écarteur anal" sépare ménagement et management. Car si les salariés sont une engeance, la plainte est leur religion. Qu'un individu normalement constitué leur soit jeté en pâture avec la casquette de chef, armé d'une simple veste que certains prennent et d'autres retournent, et le défilé se met en place... Blanche-Neige a ses sept nains, le manager, aussi...

Grincheux, souffle mieux que personne sur les braises de la mauvaise volonté, quoi qu'on lui dise, quoi qu'on fasse. Il affiche obstinément cette posture aussi bourrue que puérile, il est passé directement de la cour de récréation au staff (cela-dit, y a-t-il vraiment une différence ?). Du coup il ne veut plus travailler avec Prof pour une histoire d'agrafeuse empruntée et pas rendue.

Timide est résigné, il ne prendra jamais parti, n'a jamais d'opinion, à la différence de la Joconde il n'aime pas s'exposer. Il regarde ses pompes quand ça chauffe en réunion, mais n'en pense pas moins et régurgitera tout à la cantoche, le gars vise con.

Atchoum, qui est toujours en arrêt maladie, surtout si on lui fait remarquer qu'il est souvent en arrêt maladie.

Prof, il maîtrise, mais c'est con, il s'écoute parler et ça gâche tout.

Simplet, ce collaborateur si sympathique qui adore le foot et les afterworks.

Dormeur, facile à détecter en réunion, souvent ce chercheur dort.

Joyeux, il fait des blagues, il est formidable.

Le privilège du manager, c'est qu'il a du bonus :


Fayot, qui se frotte sur sa jambe et rit à tous ses bons maux. Fayot est un chorégraphe, qui maîtrise comme personne l'art de se placer.

Délégué du personnel, qui interjectera toujours de bonnes raisons de ne pas faire ce pour quoi il est payé au motif qu'il nous fait déjà une grande faveur de s'être déplacé sur son lieu de travail. C'est Grincheux, mais piquousé à l'idéologie moyenâgeuse, de l'auberge on n'est pas sortis.

Belle ingénieure, du genre jolie et docteure en statistiques, elle est bonne et en plus, elle est bonne, changeons d'univers, c'est la schtroumpfette. Cela lui vaudra d'être quoiqu'elle fasse, le pot à ragots, l'aimant à jalousie, la Maintenon du bureau. L'ennui, c'est que parfois, c'est vrai et l'ingénieure devient ingénue.

Je pourrais continuer, avec Carrément Méchant, Jamais Content, Bordélique, Aigri, Distrait, Glandeur, Psychologiquement Fragile, Grande Gueule, Magueule, Langue de Pute, la famille est étendue et consanguine.

Dans ce maelström d'humanité distordue, notre chefaillon a directionnellement un rôle de méchant puisqu'il n'est pas là pour dire oui à toutes les doléances dont il est abreuvé dix heures sur 24. Parfois, la réalité est vicieuse qui met plus d'un responsable en situation cornélienne. Un Vipi, équivalent corporate du Grand Stratéguerre, lui tient à peu près ce langage : "tu vires 3 personnes dans les 2 mois, ou alors c'est toi qui est viré". Rigolez, c'est arrivé près de chez vous. A peine le temps de souffler dans ce bureauthlon, le voilà danseur du ventre si l'un des bons lui tend sa démission, juste un peu plus tôt que prévu.

Alors regarde, regarde un peu, toi le salarié énervé qui ne voit le monde qu'à travers le hublot étriqué de ta capsule ombilicale, et souviens-toi que dans l'océan du travail les créatures aux habits sales encaissent plus de pression hyperbare que toi.

"People with ties are people who are not smart enough to make money with normal clothes".

mercredi 15 avril 2015

Alexpiration

Parfois on va chercher très loin des choses qui résident sous nos yeux, des évidences si présentes qu'on ne les calcule plus. Dans ma quête cervantesque pour raser les crevards de tout poil, j'ai parcouru le monde, exploré, défriché, démasqué, souffert, pris sur moi, essuyé. J'ai subi les taxis parisiens, les journalistes et les consultants. J'ai pointé du doigt des idiots exotiques en mal de castings et des sportifs manchots, alors que la pire espèce qui peuple ce monde est juste là, tout contre moi, posée sur mon cœur. Elle est tapie dans ma poche, nous passons nos journées ensemble. Elle a tellement peur que je l'oublie qu'elle a laissé sa carte dans mon portefeuille. Bleue, dorée ou noire, cette carte a toujours la couleur de la vaseline, c'est celle de ma banque. On dit que le plus vieux métier du monde est la prostitution, c'est faux : pour exister elle avait besoin d'argent. La banque est le premier maquereau de l'histoire.

Mais la comparaison ne s'arrête pas là, même si je réfute l'idée de mettre les banques au même niveau que les putes, car avec les putes, au moins, on s'amuse en se faisant vider les bourses. Et puis on paie avant, pas après. Cependant voilà le paradoxe, dès que la banque entre en jeu, rien ne va plus, c'est une sorte de partouze financière qui se met en branle, avec votre commercial conseiller dans le rôle de DSK et vous dans le rôle de Jade, le cul à découvert et le fun en débit différé. 

Evidemment, rien de tout cela ne paraît en surface. Dans la banque, on est sérieux, on affiche cette posture de notable de province pour masquer la culotte sale cachée dans le coffre. C'est qu'il faut avoir l'air respectable pour parler d'argent. En général, ça commence de manière très feutrée, avec une cravate. Pour peu que vous possédiez trois francs six sous, vous verrez s'illuminer l’œil opaque de votre commercial conseiller, excitation qui se manifestera par une prise en main de son organe sensible, la calculatrice. Il la caressera jusqu'à ce qu'elle crache une flaque de taux sur un contrat. Contrat qui, bien roulé, prend la forme d'un dildo dont le nom local est assurance-vie. Moi j'appelle ça des placements Spéculoos : c'est enrobé d'un super packaging et à la fin on ne récupère que des miettes. A force d'écouter ses mots abscons qui ressemblent à ceux des médecins que Molière décri(v)ait, j'ai toujours trouvé drôle qu'il m'appelle Monsieur alors que je ne suis pour lui qu'un taux d'intérêt qui parle. Tais-toi donc, Alex, range ton revolving, ça va encore te coûter des frais de gosier. Après tout il ne s'agit que d'acheter de l'argent.

Mais ça, c'était avant. Maintenant que l'escompte m'est compté, je vois en face de moi... Personne, et à la place j'entends des serveurs vocaux me chanter un vibrant hommage à Zebda et à leur célèbre formule : "je crois que ça va pas être possible". Le comble pour une banque, c'est de vous laisser pour compte. Alors il m'arrive de rêver d'évasion avec ma conseillère, je l'imagine sur sa chaise baissée. Peut-être que finalement je trimballe le fantasme inavouable de me faire une pute sur un lac près de la frontière suisse ? Mais qui d'autre qu'elle peut m'amener sur les rives du bel agio ? Et puis pour elle, ce serait facile, elle a tellement de congés qu'elle va plus vite en posant des semaines de travail.

Quand ce qui devrait être le poumon de l'économie se contente de recycler sciemment les liquidités en circuit fermé, cela s'appelle un PIB-ocide. La FED, la BCE et la Banque de France (intermittente du spectacle inter-bancaire), telles Flora, Pâquerette et Pimprenelle, gesticulent pour tenir éloignés les taons à taux qui vampirisent sang pour sang (merci Johnny) des flux au lieu de polliniser. Quelle chance que d'être un parasite sans prédateur.

Trêve de jérémiades ! Je n'ai pas besoin de rêver d'une banque, j'ai déjà trouvé la banque idéale, celle qui me proposera de financer ma pierre tombale avec un taux d'enfer et sur laquelle sera inscrit : "ici repose Alexagère, expiré le 15/04/20??, date de valeur 1er octobre".

dimanche 12 avril 2015

Odette

Aujourd'hui je bouscule l'agenda, car, pour la deuxième fois en peu de temps, un événement survient qui me bouleverse. La première fois, c'était le 7 janvier, déjà à cause d'un prénom.

Hier, je mettais la touche finale à ma prochaine exagération, et puis, à la bourre comme toujours, nous dûmes partir à un anniversaire dans le quartier. Petit comité, vins et fromages, chat mignon et enfants sages, everything in its right place. Elle était là, au milieu de ce banc amical, toute souriante. Avec une gouaille lumineuse et un humour dévastateur, elle posait des questions franches et directes tout en faisant quelques allusions à son vécu. Du haut de son mètre soixante et de ses bientôt quatre-vingt printemps, Odette dénote dans le climat habituel de ce genre de fête. Moi, j'adore. En plus elle m'a dit franco que j'étais beau mec, alors vous pensez, j'ai fait le plein d'ego pour les 40 ans qui viennent.

Odette peint. Au fil des verres et de la conversation, elle nous invite à visiter sa maison, dans l'arrière-cour de l'immeuble. Le petit groupe descend l'escalier et nous nous retrouvons dans son jardin. A chaque pas, on réalise que l'on entre dans un lieu particulier, un endroit chaleureux, un cocon. Les toiles enchevêtrées dans son atelier rayonnent de joie, de couleurs, de textures. Des styles, des tailles, des thèmes différents, avec pour fils conducteurs la beauté et la vie. Sa dernière toile, faite à la fourchette, me reste dans la rétine. C'est une ode au bonheur. Au détour d'une question de sa voisine, Odette revient sur ses débuts de peintre, et sur les étapes précédentes. La première de ces étapes, c'était l'orphelinat où elle s'est retrouvée à 4 ans parce que ses parents ont servi de combustible à un fabricant de fours allemand établi en Pologne. Elle me tend le livre qu'elle a écrit, me demande de bien lui rendre, c'est le dernier qui lui reste. Je n'en dirai pas plus, d'abord par pudeur, ensuite pour éviter de la jeter en pâture au marchand d'ananas qui se fera une joie de gueuler partout que les juifs revendiquent le monopole du génocide. 

Merci Odette, pour votre gaieté, votre appétit de vie, merci de m'avoir rappelé, juste en étant vous-même, que mes petits bobos de bobo cadre quadra ne sont que des verrues de l'âme, merci d'avoir ouvert votre cœur dans ce monde où il est de bon ton de jouer au gros dur. Sur le chemin du retour j'ai pleuré, en étant heureux de vous savoir tout près de chez moi et en me promettant de vous écrire ces quelques mots.

mercredi 1 avril 2015

A poil

A toi qui m'as précédé aujourd'hui dans la douche des vestiaires, je voudrais rendre ce vibrant hommage. Je tiens à préciser en introduction que j'ai fait l'armée, et que je ne suis pas bégueule, ni maniaque, enfin, pas plus que Desproges. Mais voilà qu'un certain atavisme médical et un goût prononcé pour l'hygiène ont repris le dessus et me poussent à répondre avec ma plume à ton abandon de pelage.

Tout avait bien commencé. Nous rentrions de notre petit trot méridien, les uns et les autres papotaient en grappes sur le banc. Comme il y avait du monde, chacun attendait son tour pour l'atelier lavage. Le mien arriva enfin et je me dirigeai vers le jet tant attendu, tout nu dans ma serviette, qui me servait de pagne, j'avais le rouge au front et le savon à la main, quand vint une vision, mais pas dans l'eau de Seltz...

D'abord, j'ai cru à une blague. Après tout, on est le 1er avril et il y a une bonne bande de potaches dans ces quelques mètres carrés. En découvrant la forêt de poils qui jonchait le receveur, j'ai pensé que tu avais couru avec ton ours. Pourquoi pas, c'est un excellent moyen de faire des fractionnés s'il n'a pas mangé depuis trois jours. Mais non, l'ours est dans sa cage et les chattes sont de l'autre côté du mur (oui, je suis un potache comme les autres). Les hypothèses fusèrent. Peut-être t'es tu roulé dans quelque substance irritante, peut-être as-tu confondu le tube de Veet de ton épouse avec ton flacon de Mennen-qui-pue ? Peut-être as-tu mué, tel le bison au printemps ? Ton slip t'a-t-il tant irrité que ce fût l'hécatombe dans le bush tout le long de ton SIF(*) ? Bah, à quoi bon réfléchir ?

Moi qui ne supporte pas de voir l'un de mes poils se promener en liberté, imagines-tu mon désarroi lorsque je pénétrai la cabine ? La vision de ce tapis de moumoute fraîchement tombée me fit vaciller. Que faire ? Filmer, pour prouver que la réalité dépasse Alexagère ? Las ! Mon smartphone n'étant étanche qu'aux appels chiants, il dormait tranquillement dans mon bureau. Poser le pied dessus ? Le poil mouillé est un lubrifiant bien connu, et à peine rentré de ma course, je n'avais pas envie de me casser la golèche. Et puis moi, les champignons, c'est dans les omelettes que je les aime. Ressortir et t'appeler eût été tentant, mais tu serais capable de dire que ce sont les miens ou ceux d'un autre, et il n'y aurait plus qu'à faire un constat ou appeler les Experts-Neuilly-sur-Seine pour une comparaison scientifique du nombre de vrilles. Je finis par prendre mon courage et le pommeau de douche à deux mains, et fis ce petit geste simple que tu avais malencontreusement zappé. Un siphon, font, font, trois petits poils de quéquette, et je bénis cette bonde qui avala sans sourciller le tourbillon de vilains vermicelles.

Une chose est sûre : au Salon du Poil, tu as le plus beau stand et ton oubli est entré au Panthéon des velus sales de bain. Et dire que nous sommes collègues ! Et dire que notre grand Cabinet vend de l'excellence ! Heureusement qu'il ne vend pas du carrelage. C'est donc en toute logique que j'invoquerai Malraux pour te donner mon conseil : va chez Leclerc et achète de l'acide, avec son cortège d'émanations dans le sous-sol qui pique, entre ici gros malin, avec ton terrible cortège...

(*) SIF : Sillon Inter-Fessier

mercredi 25 mars 2015

Piste noire

François Hollande connaît toutes ses répliques, mais dans le désordre. En effet, c'est aujourd'hui qu'il fallait dire : "il est où l'avion ?".

lundi 23 mars 2015

Bodybuilding

Bodybuildé mon petit déjeuner, fer, magnésium, et à peu près tout l'alphabet en vitamines,
Bodybuildé le rugby, on dirait des tortues ninjas,
Bodybuildé le garde du corps de Marine Le Pen, t'as peur ou quoi ?
Bodybuildé le capitalisme, tu fais plus assez de pompes à 50 ans ? Dégage !
Bodybuildé le syndicalisme, on dirait le Sud,
Bodybuildé le fanatisme, à coups de Captagon astique-toi avec ton canon,
Bodybuildé le son sur Rires & Chansons, tu veux me détendre ou me stresser, bordel ?
Bodybuildée l'information, écrans dopés aux stats ils s'piquent,
Bodybuildé l'euro, l'Acropole nous laisse de marbre,
Bodybuildée, ma course est mise à pied,
Bodybuildée la concurrence, Rafale et ses ailes de poulet à l'arrachée à force de faire aumône !
Bodybuildé le vin, que reste-t-il de St. Amour ?
Bodybuildé mon smartphone, maintenant c'est lui qui me regarde,
Bodybuildé le narcissisme de ces blaireaux qui se pavanent au lounge Business Premier de l'Eurostar, et dire que vous faites tout ça pour ça...
Bodybuildé le digital, quand est-ce qu'on arrête avec la mode des mots en pâte à modeler ?
Biodybuildé le bio à toutes les sauces,
Bodybuildées les grosses têtes, et les grandes gueules
De requins dans mon bassin, bodybuildées, oui.
Bodybuildé l'ordinateur.
Rachitique, la tranquillité.

dimanche 15 février 2015

Le pays où la vie est moins chérie

Aux Etats-Unis, tu rentres dans un magasin, tu es un client.
En France, tu rentres dans un magasin, tu es un emmerdeur.
En Etat Islamique, tu rentres dans un magasin… Y’a pas de magasin. Alors tu es en colère, tu retournes dans un magasin en France, et tu tues tout le monde.

En France, la première question d'un décideur est : combien ça coûte ?
Aux Etats-Unis, la première question d'un décideur est : combien ça rapporte ?
En Etat Islamique, la première question d'un décideur est : combien on fait d’audimat ?

En Etat Islamique, si tu critiques le prophète, on te tue.
En France, depuis le 7 janvier, et à Copenhague depuis le 14 février, si tu critiques le prophète, on te tue.
Aux Etats-Unis, si tu critiques le prophète Monsanto, on te tue. D’ailleurs on te tue aussi si tu le respectes, mais plus lentement et de l’intérieur.

A Paris, tu appelles un taxi, tu te fais insulter, alors tu appelles Uber, et tu te fais insulter, par le taxi également.
A New York, Boston, Miami, Los Angeles, Seattle, San Francisco, tu lèves le doigt pour te gratter le nez, trois taxis s’arrêtent.
A Kobané, tu appelles un taxi, il vient vers toi et il explose.

En France, tu veux mourir, la loi t’en empêche.
En Etat Islamique, tu veux pas mourir, la loi t’en empêche.
Aux Etats-Unis, tu veux mourir, ta banque t’en empêche.

En Etat Islamique, il faut tout donner à dieu.
Aux Etats-Unis, il y a dieu pour tout pardonner.
En France, il y a Dieudonné.

Aux Etats-Unis, tu veux acheter une arme, avec plaisir, sur place ou à emporter dans votre école ?
En France, tu veux acheter une arme, avec plaisir, sur place ou à emporter dans votre cité ?
En Etat Islamique, tu veux acheter une arme, avec plaisir, c'est pour exploser sur place ou pour emporter ?

Aux Etats-Unis, le DRH est un business partner.
En Etat Islamique aussi.
En France, le DRH est un préposé au stock de viande.

Aux Etats-Unis, tu envoies un CV, c'est bien vu, ça signifie que tu veux travailler.
En France, tu envoies un CV, tu es un tocard qui s'est fait jeter de là où il est.
En Etat Islamique, pour envoyer un CV... Vous justifiez d'une expérience réussie d'au moins cinq ans en délinquance avec violence. Paumé et sans repères, vous détestez les juifs et les apostats sans savoir pourquoi, vous êtes très motivé(e) pour en découdre avec une société que vous rejetez et vous êtes prêt(e) à rejoindre le premier connard qui vous fera croire que vous avez une famille. Vous maîtrisez Grand Theft Auto et les armes automatiques, de poing et de jet (AK47, Tokarev, arbalète). Vous aimez le contact avec la clientèle. Après une période de formation auprès de nos moniteurs titulaires du BOOMFA, vous partirez sur le terrain afin de développer nos marchés à l'export et ouvrir de nouvelles gorges de business. Autonome, vous avez un grand sens de l'initiative pour choisir vous-mêmes les innocents que vous massacrerez sur le territoire qui vous sera affecté. Vous êtes photogénique en tenue de combat (cagoule fournie). Ce poste nécessite de fréquents déplacements. La connaissance des outils bureautiques et de communication est indispensable. Un séjour en univers carcéral serait un plus. Package attractif, forte prime sur objectifs. Possibilités de progression rapide. Contrat à durée islamisée. Merci d'envoyer CV, book et versets de motivation à notre service recrutement, Maison d'arrêt de Fleury Mérogis, 7, avenue des peupliers 91 Fleury Mérogis Cedex.

mardi 10 février 2015

Ça sent le sapin

Elle me manque, mon Autriche quasi-natale. A trois mois près, on m’aurait appelé Alexander. Elle me manque, il faut que je la voie au moins une fois par an. C'est bête comme chou, comme un retour au code source. J’ai besoin d’étreindre mon Tyrol, d'entendre sa musique, dormir dans ses prairies, voir mes montagnes, sentir mes sapins en me promenant sur les wegs. Même si mon village est devenu une station star, boursouflée d'hôtels pour russes en goguette, je l'aime. Et mes pistes ! Ah, mes pistes, vous m’avez vu grandir, glisser, sauter, tomber, me relever. Vous avez fait de moi un krazy kanguruh heureux. Précision : ce nom est celui d'une piste bosselée mythique qui s'est fait voler sa notoriété par le chalet devenu bar branchouille installé sur son bord, où désormais des tonnes de viande saoule vont et viennent au son du DJ et des rots de chevaliers teutons. Mais qu’est-ce que ça peut faire comme bruit un kangourou ! Et puis vint l’adolescence, la bière, les wursts, les filles, les wursts dans les filles. Et la neige, toujours. J’ai un flocon dans le cœur. Juste derrière l'étoile.

Noël, c'était magique. Il faut dire que là-bas, on ne rigole pas avec le petit Jésus. Conifères parés de leurs plus beaux oripeaux, cuisine à se damner comme les pistes, grands feux crépitants, cloches, bougies et couronnes. Ô Tannenbaum... Une ambiance flamboyante, quelque part entre Heidi et le Klu Klux Klan. Oui, car c'est un endroit où les bronzés ne font pas de ski. Les seuls qui ont droit de cité, ce sont les rois mages. Et encore, c'est pour un CDD de 24 heures.

Qu'elle était belle ma montagne ! Les forêts majestueuses, tous ces arbres de front, c’est une fierté nationale, mais à un point ! Mes amis autrichiens aiment tellement leurs sapins qu’ils ont toujours préféré brûler les juifs à la place. Alors vous pensez, moi sur les pistes, si je faisais chauffer mes planches ! J’ai toujours veillé à faire la différence entre schuss et anschluss, même quand on posait en faisant Heil ! à l'école de de ski. C'est peut-être pour ça que je skie vite et avec un style qui fait fureur...

Vivre un tel paradoxe n'est pas commun. Parfois, j'imagine si les Merah, Fofana, Kouachi, Coulibaly, étaient nés à Linz dans les années 20. Qu'auraient-ils fait devant le siège viennois de la SS en 1942 ? Voyez-vous le dilemme de ces garçons : courir pour fuir ou courir pour rejoindre ? Parfois, j'y pense, et je n'oublie pas, quand je marche dans la nuit autrichienne sous la voie lactée jaunissante.



vendredi 23 janvier 2015

After 8, before midnight

Invité à l'insu de mon plein gré pour fêter le gain d'une affaire importante, je me suis retrouvé hier dans ce que l'on appelle un afterwork. Je déteste ce moment post-poste, ce pot entre potes-collègues qui ressassent jusqu'à l’écœurement leurs anecdotes de bureau ponctuées de rires gras baignant dans la bière et l'horizon borgne de cadres au dynamisme incertain. Je déteste, mais je ne peux m'y soustraire, on aurait vite fait de me dire "Alex, t'exagères !" et je n'ai pas les moyens de faire à mon patron le cadeau de me traiter d'asocial. En effet tout le power grid de l'équipe se transporte le temps d'une soirée, juste histoire de changer de décor, de rafraîchir l'eau dans l'aquarium des requins, il paraît que ça soude.

Le cadre est un poncif du genre, un pub qui représente une merveille de mécanique des fluides grâce à l'équilibre entre le flux de bière servi à l'entrée et le flot d'urine déversé à l'arrière vingt minutes plus tard (vous connaissez maintenant la différence entre la bière et le pipi). Il pleut des limonades et des Kilkenny tièdes, des mojitos glacés pour employés maussades, pour cadres aseptisés. Comble, l'endroit rassemble plusieurs pots d'équipes, ce qui nous donne l'étrange loisir d'être à la fois dans le cercle et hors du cercle, observateurs et observés, scrutés, toisés, on est à Paris quoi, merde. Selon l'angle adopté, l'on peaufine notre contradiction. Nous, on est classe et on discute, alors que les autres gueulent et se comportent comme des beaufs. Nous on est à fond, les autres ils tirent des tronches. Las ! Ils n'ont qu'un gramme d'avance. Comme une guirlande de fréquences basses et de rires stridents qui passe de table en table, une sorte d'ola sonore célèbre l'indigence managériale du quartier.

L'alcool, au fil des volutes, aide quelques langues à se délier, celles des coincés de la glotte, celles des lèche-culs, celles de ceux qui en bavent. Une fois passé le cap du gramme cinq, le boss désinhibé, qui n'est qu'un beauf à galons, inaugurera la séance des blagues racistes, c'est sa manière d'être cool. Elles commencent en général par "vous savez pourquoi les arabes...". Sous l'éclairage à leds se révèle sa laideur. Tout le monde se tordra de rire, la base de la base c'est de fayoter pour au moins survivre. Arrivés à deux grammes, on en sera à "ouais mais la confrérie des zizis coupés, ils le cherchent un peu, aussi". Le terrain est mûr pour se lancer dans un débat sur les attentats et leurs causes. Comptoir, tiens-toi bien et soutiens-moi fort ! Les commentaires, à la hauteur du zinc, sont vibrants d'incompétence géopolitique, je fuis Charlie.

Juste à côté, les timides bravent les lois de leur gravité. Le cœur à la dérive, ils se forcent à ne pas parler qu'à leurs amis Facebook. Parce que ce soir-là elle se sent un peu seule, parce que ce soir-là il a les pommes de terre au fond du sac et parce qu'ils ont travaillé sur le même projet, leurs vagues regards se croiseront entre deux renvois d'assiette charcuterie et ils iront prolonger cette illusion éthylisée dans une soirée baisouillette-sur-Ikea qu'ils prendront pour le début d'une histoire. Ou peut-être qu'il ne se passera rien, elle ne voit en lui qu'un bon copain, cet animal de compagnie dont les femmes raffolent quand elles veulent s'épancher sur les vertus d'un autre. Si c'est le cas, il mettra le cap sur les trois grammes en remplissant le ballast de vodka - Red Bull tout en replongeant immédiatement le nez dans son smartphone. Ironie du sort, la musique de fond est Ultra moderne solitude de Souchon. Manque plus qu'Highway to hell.

Dans la salle du fond, changement d'ambiance, on dirait un cours de zumba... Non ! C'est un pot de départ et la strip-teaseuse de circonstance tex-averise les garçons qui éructent des encouragements à l'effeuillage avec la classe d'un taxi parisien coincé porte de la Chapelle. Et l'on n'échappera pas à l'intro de Seven nation army en version beuglée façon école des ânes...

Vers 22 heures on commencera à sortir au son du faukjihaille, c'est l'heure où les bretelles soutiennent le présent des passants répandus et des alcoolisants. Tu vas par où, par là, ah, tu veux que je t'accompagne, nan mais je vais prendre un Vélib, ah ok. Charlie est déjà loin, la chape de plomb de la couille-mollitude ordinaire a recouvert les tombes des dix-sept victimes. C'était il y a quinze jours, c'était il y a un siècle, et les deux mille victimes de Boko Haram au Nigéria lors de la même semaine, on s'en fout.

jeudi 8 janvier 2015

Môman chez les nombrilistes

6h15 ce matin. Je me réveille avec comme une gueule de bois, le sentiment d'être Charlie avec ses drôles de larmes. La veille, j'étais tranquillement en train d'écrire ma prochaine histoire quand soudain des visiteurs venus du Moyen-Âge ont fait irruption dans l'actualité en passant par la porte de derrière, normal pour des enculés, afin de faire une liquidation le premier jour des soldes, faut-il être stupide. Ils avaient l'intellect de Jacquouille dans le corps d'une racaille, on voit ce que ça donne. Le seul antidote contre ce genre de cafards étant de continuer à écrire, vivre et rire coûte que coûte, j'affûte mon clavier qui sait à quel point j'emmerde les fanatiques de tout poil, et vous remarquerez, du poil ils en ont sur la figure depuis la nuit des temps. Ça fait un bail que le diable a troqué ses cornes pour une barbe, c'est plus tendance. Attendez... On me dit dans l'écouteur que non, y'a qu'à voir les skinheads. C'est exact, mais les skinheads, ils sont chauves aussi à l'intérieur de la tête. Alors que de nos jours, le terroriste a le look beauf' que Cabu dessinait si bien, à croire qu'il s'est inspiré d'eux. Tu t'es vu sans Cabu ? Mais les gars, il ne suffit pas de jouer à Call of Duty en survêtement Adidas. Merde, sapez-vous au moins, pour faire le djihad. C'est vrai quoi, ils ont un goût de chiotte, à vouloir faire les hipsters avec leur rasage approximatif et leurs djellabas à 244 balles. Forcément, c'est pas du American Apparel. En plus, la kalachnikov ça ne va pas du tout avec le noir, ils devraient le savoir, c'est leur cri de ralliement : "kalach pas noir !". Un peu de classe messieurs : on décapite en Armani (non, non, ce n'est pas une invitation à prendre votre billet pour Erevan !) et un bon kamikaze sourit quand il se fait sauter, c'est important pour la photo. Bref, si l'hérétique est un bon combustible, le fanatique, lui, n'est pas soluble dans l'intelligence et ça finit par nous casser les douillesSainte Inquisition, Saint Barthélémy, guerre sainte... C'est curieux chez les saints, ce besoin de faire des morts. C'est peut-être pour ça qu'on les canonise. Que c'est dur d'être tués par des boulets.

Venons-en à ma petite analepse. Ne me demandez pas pourquoi, mais avant-hier aux alentours de vingt heures, ma télévision est passée juste devant mes yeux au moment du jité de TF1. C'est vrai, j'avoue, à cette heure où les maîtresses des uns se font sauter par les maris des autres, je l'ai regardée en me délectant du bouillon de potouf(*) de la veille. Entre Lepaon et la plume de Houellebecq, nous eûmes droit à un moment jubilatoire quand Môman Bernadette, venue ramasser ses pièces jaunes, retoqua Gilles Bouleau, qui n'est pourtant pas le pire des journalistes puisqu'il court le marathon en 3h30. Mais d'avoir un peu trop titillé Môman façon Star Academy, pour Nicolas appuyez sur 1, pour Alain appuyez sur 2, il eut droit à un recadrage en règle, le genre bourre-pif corrézien. Faut pas faire chier Bernadette quand elle remue sa tirelire. Coup de boule, humm humm et sourire figé, tout de suite la suite.

On enchaîne avec une longue séquence sur les quarante ans de la chaîne. Purée, le générique du jité de quand j'avais huit ans ! Je connaissais déjà Cabu, Reiser et Wolinski. "Bonjour !" dit Mourousi avec la tête enfoncée dans les épaules. Séquence émotion ? Pas vraiment. Je m'attendais à ce qu'un type vaguement intelligent et vaguement humble insère dans ce long défilé de tronches et d'extraits, un "merci". Tu parles Charles, c'est limite si ce ne fût pas à nous de dire merci pour ce moment. Plus fort que Mon curé chez les ploucs, ce fût Môman chez les nombrilistes.

Si la soupe qu'ils nous servent depuis 40 ans était populaire, il y a longtemps qu'il n'y aurait plus de clodos dans ce pays.

(*) Potouf : recette à base de macreuse, paleron, basse-côte, divers légumes et un bouquet garni.