Bienvenue sur Alexagère

Opinions tranchées, points de vue partiaux, caricatures iconoclastes, analyses simplistes, expressions à l'emporte-pièce, conclusions hâtives...
Des avis sur tout mais surtout des avis. Taquin mais pas moqueur, écorché mais pas donneur de leçon, provocateur... De rires je l'espère.
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vendredi 30 septembre 2016

Alepsagère

- Tu as vu cette horreur ?
- Laquelle ? En ce moment c'est le catalogue que je redoute...
- Alep.
- Quoi ?
- Alep, Syrie.
- Ah ouais, le truc, là !
- Ouais, le truc, là.
- Ouais bon ben qu'est-ce que tu veux que je te dise ?
- Ça ne te fait rien ? Les russes qui font une partie de Call of Duty en vrai, à coups d'hôpitaux-melbas, 250.000 personnes piégées et des centaines de morts ?
- Franchement, c'est loin, c'est des arabes, je comprends rien, je m'en fous.
- Franchement, c'est simple : un peuple massacré par un dictateur soutenu par un dictateur, dans un pays rongé par le cancer de l'EI financé par d'autres dictateurs avec la bénédiction de leurs fournisseurs.
- Bon... So what ? Tu veux que je pleure ? La guerre c'est l'hygiène du monde. T'es gentil toi, tu as l'air d'oublier la misère qui est sous tes fenêtres. Et puis si ça permet à MBDA de vendre treize AASM à la douzaine, c'est bon pour notre PIB et ça maintient l'emploi.
- Cynicor !
- Bobor ! Qu'est-ce que tu crois ? Et qu'est-ce que tu as fait pour eux, toi ?
- Rien, je n'ai rien fait. Mais je n'ai pas vu beaucoup de bobos changer leur photo de profil Facebook pour inscrire "je suis Alep" et ça me fout le cafard. On pourrait au moins leur envoyer ce message de soutien, à ces pauvres gens.
- Mais t'es gentil avec tes incantations ! Tu veux pourfendre qui ? Tu veux marquer ça sur Facebook ? Et après ? Tu vas changer quelque chose à ta vie, faire quelque chose de concret ? Kiss my ass ! A midi, tu reprendras deux fois des nouilles. T'as qu'à faire Paris-Damas en Vélib et leur livrer des médicaments, au moins ce sera concret.
- Très drôle.
- T'es lâche.
- Non, je suis triste.
- Arrête ta sensiblerie culpabilisante s'il te plaît. Et puis ça sert à quoi d'être sensible ?
- Ça sert à savoir que la vie de ces pauvres gens vaut autant que celle de journalistes de Charlie.
- Pfff... Allez, tu me fais chier avec tes leçons de morale.
- Il n'y a pas de morale. Et quelle leçon ?
- Et puis quoi, tu vas me chanter du Aznavour ? On ne l'entend pas beaucoup ce connard, est-ce que la misère est vraiment moins pénible au soleil ?
- T'as raison, ça fait avancer les choses ce genre de réflexion.
- Ah ouais ? Je vais te dire, il se font massacrer, hé ben c'est autant de réfugiés qui viendront pas crever chez nous.
- Trump, sors de ce corps !
- Tagueule ! Tu penses la même chose. Assume un peu. Tu leur donnes de l'argent toi, quand ils viennent faire la manche aux feux rouges ?
- Pfff... Tu sais très bien que ceux des feux rouges ce sont des manouches.
- Ah ?! Et ça te gêne moins on dirait. C'est quand la dernière fois que tu as été dans un camp de manouches ?
- ...
- Allez, mets-nous Koh Lanta. Tant qu'à voir des maigrichons en slip, autant qu'ils soient débiles et qu'il y ait des cocotiers. La misère intellectuelle a toujours l'air moins pénible au soleil...

mardi 13 septembre 2016

Lino, va t'en

Pour innover, c'est simple.
Prenez une vieille salle de réunion, ou un local pourri, avec si possible une jolie vue.
Négociez un budget avec le DG. 
Rénovez le tout façon D&co : aménagez l'espace avec un mobilier d'occasion recyclé du Loft (et pour 1€ de plus, embarquez les pouffes) ou de toute autre émission de télé-réalité. Il faut absolument des couleurs criardes ou pastel, parce qu'il est important de se croire dans une école maternelle. Ainsi vous pourrez plonger vos clients et prospects dans un mental régressif pour les rendre moins agressifs, le temps de tapoter l'écran de l'iPad géant que vous aurez disposé au milieu de la pièce, comme le gros joujou que tout le monde veut tripoter.

Oui mais avant cela, il faut s'entraîner, faire un bon teasing. Dites aux participants que Casimir va débarquer, et en attendant, distribuez les 18.000 Post-It que vous avez achetés chez Office Depot (à se demander si l'innovation ne serait pas un complot monté par 3M et ladite enseigne de fournitures de bureaux).

Maintenant, dites aux participants de proposer des trucs que dans vingt minutes ils seront tous d'accord dessus et dans deux jours ils auront oublié de quoi ils parlaient. C'est ce qu'on appelle la créativité. Répartissez-les en petits groupes, chacun sa couleur. Au bout de 10 minutes, tout le monde court vers le mur et celui qui a collé le plus de Post-It a gagné. Répétez l'opération jusqu'à épuisement du stock de Post-It. Pour relever l'ambiance, mélangez les carrés et dites que celui qui les rassemble par couleur le plus rapidement, hé ben c'est lui le chef et il gagnera un smoothie. C'est cela la créativité, en fait : une histoire de smoothie. On vous sert la même merde qu'avant, mais colorée et affublée d'une étiquette qui dégouline de coolitude et de c'est-bon-pour-c'que-t'as.

Quand tout le monde est bien chaud, quand ils y croient dur comme fer, alors il est temps de les récompenser. Laissez-les s'approcher du cadre magique et lancez le lâcher de cadres. Lorsque les traces de doigts masquent les icônes, invitez chacun à appuyer sur le bouton rose "Plandaction". Cela apaisera les plus féroces, ceux qui étaient arrivés en chiant des tracteurs.
Imprimez le plan en direct live, version set de table ou tapis de souris que chacun pourra regarder jaunir avec la nostalgie de ce moment.

Pensez à bien communiquer : l'innovation, c'est bien connu, ça se décrète, et surtout ça se crie sur tous les toits. Il est important que tout Paris soit au courant de votre démarche. Ainsi vous pourrez faire passer les concurrents pour des gens hyper ringards, parce que eux, ils n'ont pas mis des bonbons dans les coins, les cons !

N'oubliez pas de facturer 15.000 euros la journée (les Post-It sont offerts).
Ça y est, vous pouvez faire des ateliers de conception innovante !

lundi 1 février 2016

Hyper pas cher

Oups, j'ai raté le rendez-vous de janvier. Mais c'était pour une bonne cause, et d'ailleurs si je ne l'avais pas raté, je n'aurais pas eu matière à écrire ce soir. C'est que voyez-vous, j'étais en week-end près du Palais Royal. Non, pas celui-là, l'autre. J'ai cédé à la tentation d'aller courir sous les orangers avec la compagnie orange. Il faut dire que c'était alléchant, tous ces prix clignotants qui vous font une fellation à travers l'écran. C'est quand on se retrouve assis avec le nez dans le siège de devant qu'on réalise que ce n'était pas une fellation, mais une sodomie. C'est décidé, je ne prendrai plus de compagnie low-cost, ça fait trop mal au cul.

Bonne poire, j'ai laissé la chance au produit, qui sait ? Après tout, je ne suis snob que pendant les dîners en ville, et puis je ne fréquente pas assez de pauvres pour savoir à quoi m'attendre avec Zizijet. A tel point d'ailleurs que la première fois qu'on m'a évoqué le low-cost je pensais qu'on me parlait du sous-sol d'un célèbre bar-lounge parisien. Las ! Entre le marbre de la rue St Honoré et le carrelage de Roissy-CDG, il y a une fosse à habits sales. Du moment où l'on met le pied à l'aéroport jusqu'au moment où l'on débarque, on prend la mesure de ce que signifie le mot cheap. Pas uniquement dans la texture des sandwiches en plastic vendus à prix d'or. Cela, la SNCF l'a inventé il y a quarante ans, autant dire qu'on est immunisé. C'est avant-tout, et surtout, dans l'attitude des gens pas bons qui vous prennent en (dé)charge. C'est à croire que leurs cerveaux aussi sont low-cost. Ici des personnels au sol, là des navigants, dont le regard ne diffère de celui de la vache que par la vague lueur d'intelligence dans celui de la vache. Ils sortent de la même école de formation que les hotliners de Free et Numericable. Vous savez, cette usine qui fabrique des Jean-François et des Marie payés pour vous laisser avec votre problème sur les bras en vous disant que si vous n'êtes pas contents vous n'avez qu'à écrire. C'est simple, ils feraient passer une guichetière de l'URSSAF qu'on dérange à 16H59 pour quelqu'un d'aimable, et un taxi parisien pour quelqu'un avec qui on peut instaurer un dialogue. Raciste et moyenâgeux, certes, mais un dialogue quand même.

"Débranchez-rebranchez votre modem", "attachez-détachez votre ceinture", même combat ! C'est le mot d'ailleurs, tant ils instaurent un rapport de force qu'on devine savamment calculé afin de bien nous montrer que nous avons renoncé à notre statut de client pour endosser celui de bétail. Or, si l'on met à part un petit coup de fer rouge qui vaut plaque d'immatriculation, le bétail est mieux traité que nous-autres passagers. Qu'il est dur, le temps pax ! Obliger les femmes à ranger leur sac à main dans le bagage cabine au prétexte que l'on n'a droit qu'à un seul (putain de) bagage, puis leur dire qu'elles pourront le ressortir en cabine, c'est-à-dire douze mètres plus loin... Franchement j'aimerais rencontrer le consultant qui a facturé la compagnie pour lui pondre cette procédure. Il est trop fort le type, non seulement il a réussi à emmerder plus de monde que Sarkozy en 200 meetings (calmez-vous les amis, ça marche aussi avec Mélenchon), mais en plus il a gagné de l'argent avec une machine à extraire le nôtre. Le Cynical Mystery Tour ne fait pas planer, la boucle de ceinture est bouclée et c'est bien là notre seul droit : la boucler.

J'y allais pour courir un marathon. Je ne pensais pas qu'il commencerait dans l'avion. Moralité : ne jamais s'envoyer en l'air avec n'importe qui, poil aux Easy.