L'un
de mes amis proches, que j'appellerai A., m'épate depuis tant d'années. C'est
un garçon intelligent, sensible, délicat, cultivé, drôle, bien de sa personne,
qui a énormément de cartes en main pour être heureux. Pour une raison que des
décennies d'amitié n'ont pas réussi à tirer au clair, il est totalement
dépourvu de confiance en lui. A moins qu'un atavisme ashkénaze avéré n'ait fait
de lui un artisan de l'auto-flagellation cher à Paul Watzlawick. A un point tel
qu'il s'est auto-sabordé à plusieurs moments clés de sa vie. Son cas est une
source intarissable de questionnement et parfois de colère, lorsque l'actualité
nous inonde d'histoires malheureusement vraies où des crétins de tout poil
réussissent à accéder au cockpit sur la seule foi de leur bagou et de leur
aplomb et ce malgré une pauvreté d'esprit digne d'un chroniqueur télé. Il y en
a même qui dirigent des pays.
Que
dire en effet de ces énergumènes empouvoirés qui au crépuscule de leur quinquade,
se comportent plus que jamais comme des gamins dans une cour de récré ? Ce
serait amusant si ces types n'avaient pour sacs de billes les manettes du
déficit ou les codes de la force nucléaire. Si tu sors tes gros calots, je vire
mon soldat, tu tires contre le mur, bang, ah non, pardon, j'ai pris un vent,
t'as des gaz. De la Sibérie à la Mésopotamie il n'y a qu'un fil de
marionnettiste. Peut-être est-ce leur raison d'exister que de tenir le plus pitre,
regardez la Berlusconie. Las ! Occupons-nous de notre tonneau des Danaïdes, pour le
reboucher il eût fallu des ébénistes, nous avons eu des énarques. Des énarques
ou l'art et la manière de vénérer un diplôme à base de posture à une époque où l'imposture nous véner. Vous voulez vérifier, achetez-en un, il y a une promo chaque année. Vous verrez que dans ce purin d'élite, il n'y a pas beaucoup de Fleur qui poussent. Sans
rire, voilà une engeance qui transpire la confiance suffisante et comme si ça
ne suffisait pas, nous demande la nôtre tous les cinq ans. Des vampires de
confiance, en quelque sorte. Brrr.
Elle
est belle et fragile comme une biscotte dans l'assiette d'un parkinsonien. Et elle a décidé
de faire cocus tous ceux qui l'ont draguée juste pour qu'elle leur lèche les
urnes. Vendeurs d'espoir, écouteurs professionnels, marchands d'amis. En 2008
elle a claqué la porte. Ils n'avaient rien vu venir. Elle nous a laissés tout
seuls dans notre slip, avec notre PIB et notre brosse à dents. Pour paraphraser Prévert, on reconnaît la
confiance à la crise qu'il fait quand elle s'en va. Nous voilà démunis, perdus,
nous complaisant dans ce bordel et regardant ce chômage qui augmente comme la
vaisselle dans un évier de célibataire. Elle squatte temporairement chez des
amis mais chacun sait que ça ne peut pas durer. Elle devra partir, trouver un
refuge, un domicile fixe. Parfois elle est tentée d'aller voir son dealer. Un
shoot de fanatisme et la voilà travestie en jeune vierge dévouée à la cause de
la bombe humaine qu'elle attend au paradis en sirotant des bloody-marys.
Se faire sauter par un kamikaze, c'est moche, mais ça la soulage. L'horreur
hypnotise tellement de gens, ceux qui la déploient et ceux qui la regardent.
Réveil.
Very
bad trip.
Elle
traverse une crise existentielle. Un comble, la confiance n'a plus confiance en
elle. Comment lui faire comprendre, lui redonner de la
consistance ? Je l'ai observée, avec conscience. Comme on
regarde un escargot escargoter, comme on admire un policier péver. Je
voulais voir si elle pouvait faire quelque chose pour mon ami et je me suis
aperçu qu'à trop se donner elle a fini par se vider de sa propre substance. Elle a tout pansé et
personne n'a pensé à elle, on se retrouve comme des cloches en train
d'implorer quelque chose qu'on a siphonné. Un syphon, font, font.
Si le texte du jour est divisé en trois
petits paragraphes, c'est parce que j'ai depuis fort longtemps un ADN de tiers de
confiance.
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